11.04.2011

LE SOUCI DIÉTÉTIQUE


Histoire

Le souci diététique commence dans l'Antiquité avec le souci de sa santé. Au-delà de la simple visée thérapeutique ponctuelle, la diététique est un ensemble de prescriptions alimentaires à suivre au quotidien pour ëtre en bonne santé. Elle est issue d'une prise de conscÎence: il fallait découvrir une manière de s'alimenter susceptible d'aider à conserver ou retrouver la santé.
Lorsque l'homme a commencé à prendre du pouvoir sur le monde, avec un développement conjoint de sa réflexivité, le souci diététique a pu apparaître. Ne plus subir, trouver un mode de vie qui permette d'apprécier la vie, de la mettre à son service: la naissance de la philosophie et celle de la diététique semblent consubstantielles.
L'homme a cherché un mode d'alimentation lui permettant d'être mieux dans le monde.
D'autre part, les régimes spéciaux des athlètes grecs montrent que l'orientation de la diététique se fait également en direction de la performance.
On se soucie de soi, de plaire au monde et aux dieux en cherchant à ce que le monde et les dieux nous offrent la victoire (sur la maladie et la mort, sur les autres hommes).
Ce souci diététique originel a changé de forme en se démocratisant, suivant en cela l'évolution de nos sociétés. La place prépondérante qu'occupe la diététique aujourd'hui est directement liée à ce que l'on appelle la révolution de l'identité. Le développement progressif, à travers les siècles, de l'autonomie de l'individu et de l'importance qu'il se donne à lui-même a produit, tout récemment, un homme nouveau.
Pendant des millénaires, les individus n'ont pas été en mesure de "se réaliser". Ils étaient soumis à un destin, dépendant de leur lieu de naissance, de leur milieu social et de la profession exercée par les parents. Un fils d'agriculteur devenait la plupart du temps agriculteur, un commerçant devenait commerçant, etc.
Un individu ne se demandait généralement pas qui il était, la réponse étant apportée, a priori, par son environnement et des contraintes gérables seulement par la soumission à un ordre semblant immuable. Aujourd'hui, définir son identité, répondre à la question "qui suis-je?" c'est agir afin de se faire sa propre histoire au lieu de s'inscrire dans une histoire.
Il ne s'agit pas de "s'inscrire dans l'Histoire", ce qui n'est possible que pour les individus d'exception, mais d'inscrire son histoire dans son temps, d'exister par la réussite d'un projet de vie où l'on aura été acteur/réalisateur du sens de sa vie. Dans le monde moderne, l'individu n'est plus seulement soumis à des rôles imposés. le sens n'est plus produit par un ordre immuable. nous devons le produire.
Le processus identitaire est lié à la contrainte de donner un sens à sa vie, quand celui ci n'est plus donné "d'en haut". L'identité se résume à la production de sens. Il s'agit de se sentir être un « moi » profondément différent des autres, stable, ou qui aspire à la stabilité.

Pour que chacun ait droit â son histoire, il a fallu que des modifications sociales importantes aient lieu afin que la notion d'un individu unique, créatif et responsable, puisse apparaître.

A l'époque des Lumières (XVIII siècle), on voit apparaître un changement majeur: jusque-là, l'individu s'inscrivait dans une structure englobante dont le sens était donné par Dieu. Ce qui signifie que la raison suprême était Dieu. Toute question obtenait sa réponse en Dieu.
Le bouleversement philosophique des lumières fait éclater cette totalité englobante en remplaçant Dieu par la Raison.
L'idée se fait jour qu'il faut "raisonner", faire exercice de sa raison plutôt que se fier exclusivement. pour la compréhension du monde, à une interprétation du message divin se concluant inévitablement dans l'acceptation, la soumission. Le devoir de raison introduit l'idée d'un homme nouvellement responsable, toujours responsable devant Dieu, mais aussi maintenant responsable de lui-même devant lui même.
Le monde est ce que l'homme en fera. L'idée de la soumission au monde est progressivement remplacée par l'idée d'une possible possession du monde.
Les bouleversements économiques du XIX siècle. à l'heure du développement des Êtats nations, produisent un nouveau rapport entre le pouvoir et les individus. Il s'agit d'être en mesure de suivre les individus à travers leurs déplacements, de les identifier, de les reconnaître. L'État assigne, à chacun, une identité. La généralisation de l'ecole, qui a pour mission de former un individu plus autonome, plus capable de se gérer lui-même, introduit dans les familles un savoir différent, qui bien que complétant le savoir traditionnel, entre également en contradiction avec lui.
D'autre part, la naissance de la photographie et la généralisation des miroirs rendent le regard sur soi diHérent et plus accentué. L'individu apprend à se concevoir différemment, à se donner une valeur qu'il ne lui était pas possible d'envisager jusque-là.
Le XX siècle a confirmé ce mouvement en l'amplifiant. La création par j'État des identités et la construction des individus par j'éducation ont conduit à une recherche d'autonomie débouchant sur la quête actuelle de l'identité, de l'accomplissement de soi.
Le développement technologique avec ses conséquences (dont la faillite partielle du mythe du progrès), le développement économique mondial, dessinent un univers instable. Il faut s'adapter rapidement, et en permanence, à cet univers et, pour cela, il faut des individus éduqués, autonomes et combatifs.
À partir des années 60, nous entrons dans la société de consommation, c'est-à-dire dans une société d'abondance permettant aux individus, par la possession d'objets, de se définir plus singulièrement, de se donner davantage de valeur. L'individu fait un lien, consciemment ou non, entre la démocratie, l'autonomie et la jouissance d'être soi.
Mais, dès la fin des années 70, le développement de plus en plus marqué de l'autonomie individuelle fait que posséder ne suffit plus. Le souci de soi, qui recherchait son accomplissement dans la consommation, s'est modifié : il ne s'agit plus seulement de se "gaver" en consommant, mais d'agir, On cesse de vouloir seulement regarder des élites (du sport, du spectacle, de la politique) vivre, d'être spectateur de leur différence, de leur reussite. On veut être acteur de sa propre vie. Le mouvement vient de soi.
La valeur d'un individu se définit non plus par ce qu'il possède, mais par ce qu'il est, et donc par ce qu' il fait pour être,
S'occuper de soi devient une qualité alors que c'etait vu autrefois comme une faiblesse, surtout chez les hommes.
Depuis les annees 80. l'individu est passe du statut de consommateur a celui d'acteur.
consomme des outils pour agir, pour entrer en relation. Il se définit bien moins par les objets qu'il possède que par sa capacité à communiquer. L'informatique et Internet en sont des exemples. De même, la notion d'égalite à évolué. Jusqu'aux années 80, il s'agissait de protéger les individus autant que possible afin de réduire les inégalités. A partir de là, corrélativement à une montée en puissance de l'autonomie et de la recherche de soi, l'idée que l'égalité pouvait se construire dans une prise de risque s'est im posée. Prendre des risques, socialement, professionnellement, c'est espérer pouvoir gagner. Il peut y avoir une issue heureuse à la prise de risque, car la place qu'a chacun dans la société n'est pas immuable. Il est possible de se faire sa place. L'individu est donc, potentiellement, en mesure de pouvoir prendre une place égale à d'autres dans le grand jeu de la concurrence généralisée.

L'égalité est vue comme la possibilité, pour tous, de réussir.

Si pouvoir être quelqu'un c'est pouvoir obtenir quelque chose. Si l'on est ce que l'on devient, alors la prise de risques inévitable pour y parvenir engendre un stress considérable et l'alimentation devient un outil indispensable. Il faut savoir quoi manger pour être performant. Il faut savoir récupérer physiquement de l' effort accompli quotidiennement dans le but de se réaliser, de s'épanouir. De plus, la place (statut professionnel, relationnel, amoureux) que nous pouvons obtenir dépend souvent de notre aspect physique et de notre forme. Il s'agit de bien présenter, d'être "aux normes". La réponse adaptée aux besoins naturels et sociaux du corps permet de restaurer, de maintenir et d'augmenter l'estime de soi. Une esthétique corporelle attrayante sera plus à même de nous procurer les nombreuses satisfactions dont nous avons besoin pour nous sentir exister pleinement, notamment des satisfactions sexuelles.
Dans une société de compétition généralisée, où le sport est vu comme un modèle, il s'agit alors de prendre sOin de son corps comme un sportif un athlete pour le rendre performant. pour toujours elre en mesure de vaincre. Il s'agit d'etre un athlete du quotidien. La diététique sera donc un outil privilégié pour autoriser el optimiser la performance.


Par Olivier Lafay avec la collaboration de Pierre Manolov dans le livre "Méthode de Nutrition - Gérer L'Equilibre"- Editions Amphora, Paris, 2010, p. 13-16. Édité et adapté pour être posté par Leopoldo Costa.

À propos du livre


"Méthode de Nutrition" peut être utilisé sans connaissances préalables. C'est un ouvrage essentiellement tourné vers l'action, capable d'orienter et encadrer le lecteur dans un même mouvement. Mais il sait également former et informer le lecteur afin de le rendre progressivement plus autonome.
 Cette liberté, acquise grâce au savoir, vous l'obtiendrez au travers d'un cheminement effectué en douceur, avec aisance. Jamais il ne vous sera trop demandé. Simplicité d'accès et souplesse adaptative sont les maîtres mots de "Méthode de nutrition".  Les conditions d'une application immédiate sont renforcées. En suivant la méthode, vos actions généreront des résultats rapides et motivants.  Que vous soyez homme ou femme, sportif ou sédentaire, vous pourrez modifier votre corps à volonté, en favorisant la santé et le bien-être.

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